Novembre 2021
C’est en discutant avec d’autres équipages que l’envie nous est venue de visiter Tikehau. C’est un petit atoll situé au nord-ouest de Rangiroa, dont on nous dit beaucoup de bien. C’est le dernier atoll accessible de la chaîne des Tuamotu vers le NW.
42 milles séparent la passe nord-ouest Avatoru de Rangiroa de l’unique passe de Tikehau située sur la côte ouest. En principe pas de problème pour faire la route dans la journée, à condition de partir au lever du soleil pour bénéficier des marées favorables à l’arrivée et au départ, et tenir 6 noeuds de moyenne.
On quitte Rangiroa à l’aurore sous un ciel rosé. La passe est calme, quelques surfeurs sont déjà dans l’eau. L’allizé est faiblard et on met le moteur à plusieurs reprises pour ne pas être en retard. Mais quand on se présente à l’heure théorique de la basse mer, on a encore un fort courant sortant. La passe est étroite, peu profonde avec un seuil de 3 mètres à l’intérieur (sur les cartes, en pratique plutôt 5). Nous l’apprendrons au club de plongée, de nombreux hoa remplissent en permanence l’atoll, ce qui rend la passe sortante à toutes les heures de la marée.
Juste après la passe, côté nord, s’ouvre une anse turquoise où sont mouillés 7 bateaux. C’est trop pour nous et on continue vers le nord jusqu’à un petit motu 6 milles plus au nord, le motu Hiraumaine. Bien sûr cette partie du lagon n’est pas hydrographiée et on fait la route avec une vigie à l’avant et la photo satellite sous les yeux. Mais Mr Google a bien mal travaillé, les patates sont souvent cachées par des nuages. Cette veille nous permet d’éviter une patate affleurant particulièrement traître juste sur la route. A l’arrivée, que du sable dans des fonds de 5 ou 6 m, des oiseaux partout et un calme absolu par ce vent léger de NE (probablement peu praticable dès que le vent vient à l’est). Bref, on trouve ce coin perdu exceptionnel.



Le lendemain on a la mauvaise idée de vouloir changer de mouillage. On vise la partie NE de l’atoll, mais la côte est blindée d’énormes patates qui interdisent toute la zone. Petit détour par le motu Puarua, réserve d’oiseaux où il est trop tard pour espérer voir le fond. Retour un peu scabreux à notre précédent mouillage en suivant scrupuleusement notre trace d’aller, car le soleil est désormais trop bas sur l’horizon pour éclairer efficacement les dangers.

Troisième jour : visite de l’unique village Tuherahera, situé à la pointe sud. Le chenal est parfaitement hydrographié et balisé pour les goélettes de ravitaillement. Le mouillage est au vent avec un gigantesque quai où l’on peut s’amarrer pour un moment, praticable par le vent faible qui règne depuis plusieurs jours.

Juste en face du quai, un petit snack régale les locaux de volumineux burgers, et nous de thon cru, pour poursuivre notre cure. En face, un club de plongée très actif.
Le village se répartit de part et d’autre de deux rues parallèles. Même si les maisons sont plutôt vétustes, elles sont entourées de grands jardins avec de beaux arbres (arbres à pain, manguiers, bougainvillées, hibiscus…). C’est très différent des autres villages des Tuamotu, ce qui est peut-être lié à l’élévation de l’atoll d’une dizaine de mètres au dessus de l’eau.

Au bout du village est construit un immense abri anti-cyclonique sur pilotis. Dans le passé la moitié du village a été détruit par un tsunami. On s’interroge sur l’unique finalité de cette coûteuse construction, qui par définition servira rarement. N’aurait-on pas pu l’utiliser à autre chose, les 99 % du temps où elle est vide? Etrange emploi des deniers publics…


Dernier mouillage à côté de la passe après avoir tourné longtemps pour planter l’ancre sur du sable entre les innombrables patates. L’endroit est magnifique entre un petit village de pêcheurs et les parcs à poissons, mais très peuplé comme on l’a vu en arrivant. Un récif affleurant est censé le protéger du reste de l’atoll par vent dominant. Nous sommes sceptiques.
Petite particularité, aucun des 3 mouillages visités n’est praticable par alizé soutenu. On nous parlé d’une possibilité sur la côte est, près d’un producteur de primeurs (le jardin d’Eden), mais ce sera pour une autre visite (peut-être).
Départ le matin au lever du soleil pour rejoindre Tahiti.
Finalement de ce gigantesque archipel, on a visité 6 atolls très différents par leur taille, leur géographie et leur fréquentation : Tahanea sauvage, Fakarava le must pour la plongée, Toau et le coup de cœur de l’anse Amyot, Apataki dans un mouillage isolé, Rangiroa touristique et Tikehau plein de charme.
Mais c’est une navigation dangereuse, qui pour nous n’a jamais été sereine compte tenu de la difficulté des mouillages, des risques de renverse de vent, de l’absence généralisée de cartographie et de l’isolement. Encore plus qu’ailleurs, l’humilité s’impose.
Crepel
Toujours aussi magique …J’adore lire et relire vos récits qui me transportent ailleurs..
Merci pour toutes ces photos qui font rêver.